L’Heure Fauve de Nadj |
![]() |
![]() |
T a k t i k, mars 1995
L’Heure Fauve de Nadj
Univers où l'étrange côtoie l'insolite, où le jeu transporte vers la magie, Josef Nadj décline un monde bien identifiable depuis sa première création Canard Pékinois, en 1987. Marseille Objectif Danse présente au théâtre Toursky sa dernière pièce : L’anatomie du fauve.Création pour sept danseurs (uniquement des hommes) et deux musiciens, L'anatomie du fauve est un hommage à Vojnich Oskar. Ecrivain hongrois, voyageur, amateur de chasse aux fauves, il se pencha sur leur cruauté, leur férocité et par conséquent sur la nature humaine qui conserve au plus profond des instincts de bête. L'homme prédateur, l'homme chasseur, l'homme proie... Prétexte pour le chorégraphe à mettre en scène un monde né d'un imaginaire rempli de fantasmes, d'histoires fantastiques qui lui viendraient de son pays natal, un endroit à la frontière de la Serbie et de la Hongrie. Danseurs mi-hommes, mi-bêtes, aux comportements étranges, ils rampent, s'entortillant dans des positions incongrues. Les mouvements sont cassés, étriqués. Ces hommes sont encagés. Atmosphère lourde, la maison habitée par toutes sortes de mystères, qui tient lieu de décor, se transforme. Rideaux relevés, l'orchestre déchire l'obscurité, piano et percussions se déchaînent dans une musique assourdissante avant d'être happée par l'obscurité. Ici, un danseur apparaît par une trappe, là se tiennent en équilibre d'autres silhouettes. Un paraplégique traverse la scène en fauteuil roulant pour un tango avec un costume sans tête. Hommes en cercle autour d'une table, marche funéraire, exercices de magie, acrobaties ? Nadj mélange les genres, théâtre, mime, danse. Le chorégraphe a été formé aux Beaux Arts de Budapest puis de Paris. Il dessine ses décors, l'espace de ses pièces. Il pratique les Arts martiaux, base de l'entraînement de sa compagnie, sa danse est robuste, les danseurs agiles. Les images défilent, s'enchaînent, vite, très vite. L'oeil du spectateur essaie de suivre cette boulimie de gestes. Peut-être reste-t-il un peu frustré de ne pouvoir tout attraper ?
Murielle Fourlon |