"Le genre est une catégorie d’analyse qui permet de décrire le masculin et le féminin comme des constructions sociales.
Employé au singulier, il désigne l’organisation sociale des rapports entre hommes et femmes. C’est une construction politique et sociale liée aux différences biologiques mais non déterminée par elles." affirme Claude Zaidman.
La notion de genre, mot qui vient de l’anglais "gender", se construit à partir des mouvements féministes dans les années 1960/1970. Leur objectif était de sortir les femmes de l’invisibilité et de l’oubli où elles avaient été reléguées depuis toujours et notamment depuis la Révolution française. Lorsque les Constituants ont décidé d’exclure les femmes du suffrage universel, ils ont entériné une différence entre les hommes et les femmes. La démocratie française s’est instituée en excluant les femmes de la citoyenneté, elles ont été renvoyées dans leur foyer, dans l’espace domestique privé. Cette séparation entre la sphère du public et la sphère du privé s’est renforcée tout au long du 19e siècle.
Les mouvements féministes ont refusé cette dichotomie entre le public et le privé ; des travaux se sont développés, interrogeant toutes les différences soi-disant scientifiques, proclamées à partir du 19e siècle, entre les femmes et les hommes. De leur côté, les anthropologues ont démontré que les caractères féminins et masculins se construisaient différemment selon les sociétés : les qualités jugées féminines ou masculines varient dans le temps et d’une société à l’autre, mais elles restent un moyen de justifier les différences de traitements et de positionnements sociaux.
Il faut sortir de ces qualités attribuées par nature aux femmes et aux hommes qui les confinent à des rôles différenciés.
Les études féministes des années 70/75 ont permis de montrer que cela n’avait rien à voir avec le naturel. Il est donc possible de déconstruire les représentations sociales… pour construire autre chose, qui correspondrait davantage à ce que voudraient les femmes et les hommes concernant le rapport social qu’ils ont entre eux, que ce soit dans la famille ou dans la société. Béatrice Borghino insiste sur la méthode et préconise : "Qui que nous soyons, chaque fois que nous sommes face à un thème d’action, nous devons nous demander : est ce que j’ai affaire à des réalités différentes, côté homme et côté femme ? La plupart du temps, la réponse est positive. Il convient alors de s’interroger : En quoi et comment est-ce différent ? Qu’est-ce qui fait obstacle à l’égalité ? Qu’est-ce qui reproduit l’inégalité ? A partir de ce constat, on peut et on doit penser à une réponse sexuée. On pourrait aussi imaginer une campagne officielle sur le rôle des pères dans la famille, accompagnée de mesures incitatives pour que ceux-ci y prennent plus largement leur part : sensibilisation des entreprises pour qu’elles acceptent plus facilement ce nouveau rôle des hommes, le congé parental facilité et allongé… De même qu’il y a eu (et qu’il y a ?) un coût pour les femmes à sortir des stéréotypes du féminin, il y a un coût pour les hommes à quitter la catégorie du masculin telle qu’elle est construite. La plupart du temps, c’est l’exclusion du groupe homme : il n’est pas un homme comme les autres, alors on le range du côté du féminin et on le traite comme le féminin." Les féministes doivent travailler en direction du masculin, et réfléchir sur l’articulation entre cette construction du masculin et cette construction du féminin. Et Béatrice Borghino de conclure : "Il faut travailler sur le terrain, et il faut travailler sur les mentalités. Le but poursuivi n’est pas, bien entendu, de faire des politiques séparées pour les hommes et pour les femmes. Mais il faut passer par du différencié pour créer les conditions nécessaires à ce que chaque personne puisse accéder aux droits de tous. C’est d’un universel concret et réel dont il est question, pas de particularisme singulier ou de communautarisme comme pourrait l’interpréter certains."
Murielle Fourlon